20 ans • BLACK LEATHER • Journaliste • Cory Kennedy
(c) Rorore.Ouais, je sais ce que vous vous dites: Être journaliste aussi jeune, quand qui plus est, on est une fille, ça veut forcement dire qu'on s'est fait pistonner quelque part...
Sans blague? Vous voyez qui c'est l'actuel rédacteur en chef du « Valley News and Green sheet »? Bah c'est mon oncle alors forcement: ça aide dans le milieu! J'en ai pas honte, c'est grave? Roh, c'est bon, c'est pas une tare non plus. Parce que au cas où vous ne l'auriez pas remarqué, le monde est dur!
Alors sérieux, pourquoi je devrais me gêner si j'ai une occasion d'arriver à mes fins sans bouger mon postérieur? Ok, trimer comme pas possible et gravir chacun des échelons à la propre sueur de son front, c'est classe! Mais tout ça dans le fond, c'est juste une question de fierté...et désolée, mais c'est pas avec la fierté qu 'on paye ses factures.
Bon après, il y a pas de quoi fouetter un chat non plus hein? C'est justement parce que j'ai été pistonnée que je dois faire deux fois plus que tous les autres, m'investir corps et âme...faire mes preuves comme on dit! Mouais...si vous voulez mon avis, c'est juste qu'ils me refilent tout le sale boulot ces p'tits salopiauds de la rédac'! Et vu qu'on se connait presque tous, ça m'étonnerait même pas que ce soit vraiment ça en plus. Mais bon, c'est pas grave...j'les aime quand même.
Hein? Quoi? Trop de familiarité? Ah non mais au cas où vous ne l'auriez pas encore compris, c'est pas comme si je bossais dans un grand quotidien ou un truc du genre hein? Au contraire. Pour tout vous dire, j'écris pour un tout petit magazine musical, rien de très exceptionnel donc. D'ailleurs, parfois j'ai plus l'impression de travailler pour un fanzine qu'autre chose. J'me plaint pas hein? Si je devais décrire la majeure partie de mon équipe? Une bande de fêtards qui passent leur vie en soirées, clubs, concerts et qui, accessoirement, interviewent des groupes qu'ils jugent prometteurs. Ouais en gros: c'est la belle vie !
Bon ok, je sais que pour certains d'entre vous, c'est pas très glorieux comme existence. J'commence à avoir l'habitude maintenant vu comment ma famille me le rabâche sans arrêt... « T'es qu'une sale gosse qui ne veut rien foutre de ses dix doigts. »
C'est vrai que dans un sens, j'aurais pu continuer mes études. Au moins, ça les aurait rassurés. J'crois que Mai 68, l'émancipation des femmes et tout le tralala, ils y sont pas encore très habitués. Dans leur esprit bien conservateur, je me serais surement dégoté un bon travail avant de me marier peu de temps après...j'aurais même probablement eu deux ou trois gosses.
C'est ce que ma mère a quasiment fait. Je dis bien quasiment: elle a arrêté de travailler lorsqu'elle a épousé papa. Bah oui: devenir la femme d'un éminent chirurgien, ça lui demandait beaucoup d'elle-même. Pourquoi perdre son temps derrière un bureau quand elle avait le rôle de la femme au foyer parfaite à jouer?
En moins de temps qu'il n'en fallait, elle est devenue une ménagère exceptionnelle: Douce, gentille, polie, docile, épouse exemplaire et mère sans tâche...Le stéréotype même de la WASP accomplie dans sa petite banlieue bourgeoise. Bon, elle était catholique irlandaise mais ça tout le monde s'en fout. 'Fin bref, vous voyez le genre hein? J'avais huit ans quand elle s'est fait péter la cervelle. Une balle en plein milieu du lobe temporal.
Et vous savez c'est quoi le pire? C'est que lorsque je suis tombée sur son corps en rentrant de l'école ce jour là, la première chose qui me frappa fut l'expression épanouie que son visage affichait...une expression que je n'avais jamais connu de son vivant.
Je sais qu'il y'a beaucoup plus sain que ma vie aujourd'hui. Je côtoie un milieu où règne en maitre l'alcool, la drogue et le sexe...Ouai bon, ok il y a aussi le talent, mais ça, ça compte pour du beurre en soirée...sauf bien sur, si c'est vous qui êtes sur scène. Mais bon, pour en revenir à moi (héhé), combien de fois ne me suis-je pas réveillée dans le lit d'un (ou d'une) inconnu(e) après une soirée trop arrosée?D'ailleurs, faites moi penser à vérifier que j'ai bien récupérer mes clefs quand j'essaye de me barrer en catimini au petit matin. Non parce que, sérieux, revenir les réclamer une demi-heure plus tard...ça la fout très très mal. Euh Fin'bref, là n'est pas la question.
Donc ouaip, j'sais que pour certain je ne suis qu'une débauchée. D'ailleurs, on me lance parfois que je n'ai aucune ambition. Moi j'trouve ça con...parce que justement, je me dis qu'il n'y a aucune plus grande ambition que d'essayer de mener sa vie comme on l'entend.
J'suis pas le genre de fille qui se prend la tête pour rien vous savez? Moi...j'ai pas l'intention de laisser une emprunte de moi, de marquer les esprits ou quoi que ce soit...Est-ce que cela veut forcement dire que je ne fous définitivement rien de ma vie? Ma mère, elle, n'a rien foutu de sa vie. Et elle en est morte. J'ai pas l'intention de reproduire la même erreur . J'suis jeune, j'suis conne, et si un jour j'arrive à dépasser la trentaine, peut être deviendrais-je une adulte responsable...mais j'me dis que si je clamse là maintenant, j'aurais au moins le mérite d'avoir fait ce que je voulais quand je le voulais et où je le voulais.
Certaines personnes essayent de faire la révolution autour d'eux...mais ils oublient de la faire dans leur propre vie. Pour ma part, j'pense que je me débrouille pas trop mal sur ce point là. Et ça, c'est ma plus grande fierté. (Ouais j'avais dis ça aussi pour mon soufflet réussis de la semaine dernière mais ça, ça compte pas.)
Behind The Screen.
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17 ans• Juliet • F •MGMT
(c) Rorore.